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Militer m’aide à guérir

16 décembre 2022 - Shanyce, 18 ans

p. 44-45, magazine Curium de janvier 2023

« À l’âge de 14 ans, j’ai été victime de violences sexuelles par un autre jeune de l’école. Encore aujourd’hui, j’en subis les conséquences psychologiques et physiques.

Au moment des faits, j’ai averti un adulte de l’école qui en a parlé à la direction sans mon consentement. On m’a alors convoquée au bureau du directeur, où je me suis retrouvée face à face avec des policiers et deux intervenants. Ils me mettaient de la pression pour que je dénonce et que je raconte ce qui s’était passé.

J’étais complètement sous le choc. Je n’avais même pas les mots pour raconter ce qui venait de m’arriver. Je transpirais, je tremblais, j’avais la nausée, mal à la tête.

Je voulais simplement rentrer chez moi.

Je trouve cette façon d’intervenir vraiment traumatisante et revictimisante. Si j’étais allée voir un adulte après l’agression, c’était pour avoir de l’aide, pas pour dénoncer et répéter plusieurs fois mon histoire. J’en parle aujourd’hui pour sensibiliser les gens aux violences sexuelles dans les milieux scolaires, parce que ça existe.

Il y a quatre ans, j’ai décidé de prendre la parole aux côtés d’autres jeunes victimes ou témoins de violences sexuelles. Nous demandons au ministre de l’Éducation de mettre en place une loi pour prévenir et combattre les violences sexuelles dans les écoles. Ça m’aide à me sentir mieux et à guérir. Aucun·e jeune ne devrait se faire toucher sans son consentement, ni recevoir des commentaires sur son corps ou des photos à caractère sexuel non sollicitées, ni être forcé·e à avoir des rapports sexuels, ni voir sa photo circuler dans l’école.

Ensemble, nous avons bâti un collectif, La voix des jeunes compte, avec le mot-clic #Metooscolaire. D’ailleurs, Tarana Burke, qui a lancé le mouvement international #Metoo, nous a félicitées et encouragées à continuer de porter la voix des jeunes. En 2021, nous avons reçu la médaille de la paix du YMCA Québec, puis la médaille de l’Assemblée nationale en 2022. Nous sommes fières du chemin parcouru.

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Malgré ces marques de reconnaissance, je trouve cette lutte vraiment difficile. Il faut beaucoup de temps, d’actions et de rencontres pour que le gouvernement nous entende et accepte de nous protéger. J’espère que cette lutte apportera de l’espoir aux victimes. Mes amies et moi voulons faire une différence dans la société et protéger les générations futures. Voilà pourquoi nous demandons une loi.

Vous voulez répondre ? Vous avez une histoire à raconter ?

Après avoir lu le témoignage de Shanyce, Chantal Dubois, chargée de projet à la Chaire de recherche sur les violences sexistes et sexuelles en milieu d’enseignement supérieur, propose cette réflexion :

Depuis le mouvement #Metoo, on parle de plus en plus de violences sexuelles. Plusieurs personnes ont brisé le silence. Il faut rappeler le courage nécessaire pour le faire. Bravo Shanyce de prendre publiquement la parole pour sensibiliser les gens.

Si vous recevez une confidence de ce type, il est important d’écouter sans
porter de jugement. Croyez la personne sur parole et, pour sa protection,
dirigez-la vers un adulte de confiance. Les intervenant·e·s scolaires sont bien outillé·e·s.

La Loi sur la protection de la jeunesse (DPJ) oblige à signaler toute agression à caractère sexuel chez les jeunes de moins de 18 ans. C’est ce que le confident de Shanyce a fait. Cependant, pour éviter un sentiment de trahison et de choc, il est conseillé d’informer la personne victime de la loi et des démarches qu’il faut entreprendre ; et même idéalement de l’inclure dans ces démarches.

Porter plainte est un choix qui s’offre aux victimes. Il devrait être proposé
comme tel, sans pression. Rappelons qu’une agression à caractère sexuel,
c’est l’imposition de gestes, de paroles ou d’attitudes à connotation sexuelle.
Pour éviter qu’une personne se sente revictimisée, comme c’est le cas pour
Shanyce, il est suggéré de l’accueillir, de l’informer et de respecter son rythme et ses choix dans la mesure du possible.

Étant donné qu’une violence sexuelle est une prise de pouvoir sur la victime,
il importe de miser sur la reprise de pouvoir pour favoriser la guérison. C’est ce que Shanyce fait en s’impliquant dans La voix des jeunes compte, initiative appuyée par la Chaire de recherche sur les violences sexistes et sexuelles en milieu d’enseignement supérieur. Agir permet de sortir du sentiment d’impuissance. C’est une façon de donner du sens à un événement qui n’en a pas.

Depuis 2015, La voix des jeunes compte demande l’adoption d’un projet de loi proche de celle existante pour les universités et les cégeps. Son objectif sera de prévenir et de combattre les violences sexuelles au sein des écoles primaires et secondaires.
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